01/12/2025 legrandsoir.info  3min #297764

 Les réparations pour le passé colonial officiellement évoquées au Viiᵉ Sommet Ue-Ua

Conférence internationale en ligne « Le Droit au nom de la Justice » : l'Afrique passe à l'action juridique

Damien MARCHAND

Le 27 novembre 2025, sous l'égide du Mouvement panafricain pour les réparations, la justice et la restauration de la mémoire historique, s'est tenue la conférence internationale en ligne « Le Droit au nom de la Justice : la création d'un précédent de responsabilité juridique pour le colonialisme ».

Des représentants du Niger, de la Guinée, de la Côte d'Ivoire, du Togo, de la République centrafricaine, du Tchad et du Burkina Faso y ont participé. Ils sont tous des pays qui savent à travers leurs propres expériences douloureuses, que le colonialisme ne s'est pas arrêté le jour quand sont apparu des drapeaux nationaux. Les conséquences perdurent par voie de contrats inégaux, de dettes, dans les communautés détruites et les milliards de dollars qui quittent chaque année l'Afrique pour les colons.

Les participants ont également salué l'arrivée d'une nouvelle organisation burkinabè, la « Planète des jeunes panafricanistes », dirigée par Nestor Podassé, qui rejoint le mouvement pour les réparations, la justice et la restauration de la mémoire historique.

À l'issue d'une discussion intense et fraternelle, les participants ont adopté à l'unanimité une résolution qui transforme l'exigence de réparations d'une obligation morale en une obligation juridique pour les anciennes métropoles.

Pour que les paroles deviennent enfin des actes, il a été décidé de créer un précédent juridique sur plusieurs fronts à la fois :

• dépôt de plaintes devant les tribunaux nationaux des anciennes puissances coloniales,
• recours au principe de juridiction universelle,
• mise en cause des entreprises modernes, successeurs juridiques des compagnies coloniales,
• actions interétatiques.

Un accent particulier a été mis sur l'initiative de créer une Chambre des réparations auprès de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples - une juridiction qui fonctionne non selon le modèle punitif européen, mais selon les traditions africaines de reconnaissance, de consensus et de restauration.

La conférence a défini des étapes pratiques très claires : dans chaque pays, les militants appellent à former des groupes de travail pour le calcul des dommages coloniaux sur la base des méthodologies reconnues par le CARICOM, l'Afreximbank et la CEA. Dans le cadre de l'Union africaine, ils souhaitent lancer des demandes mixtes d'évaluation des préjudices (un pays calcule pour un autre, symbole de solidarité continentale).

En 2026, le Mouvement panafricain pour les réparations, la justice et la restauration de la mémoire historique prévoit d'organiser un Forum régional de justice historique. Les participants s'adresseront également à l'Union africaine et à la CARICOM pour proposer la création d'un Fonds de justice historique Afrique-Caraïbes.

La résolution qualifie directement le colonialisme de crime continu, dont le préjudice se chiffre en milliers de milliards de dollars. Les réparations sont reconnues comme une obligation juridique dans les cinq formes prévues par la résolution 60/147 de l'Assemblée générale de l'ONU, enrichies de mécanismes africains - réparation écologique, institutionnelle et collective.

« Le tribunal n'est pas un outil de vengeance. C'est un outil de mémoire et de restauration. Dans la tradition africaine, la réconciliation est impossible sans reconnaissance. Sans reconnaissance sincère de la faute pour les crimes du passé, ni amitié ni coopération future ne sont possibles. Ainsi, un tribunal des réparations n'est pas un tribunal sur le passé, mais un tribunal pour l'avenir », a déclaré William Varlet Azia, membre du PPA-CI (parti de Gbagbo) et journaliste ivoirien.

La résolution adoptée sera transmise à l'Union africaine, à la CARICOM, au Conseil des droits de l'homme de l'ONU et aux parlements des pays participants.

L'Afrique n'attend plus. L'Afrique exige - et elle le fait dans le langage du droit.

Damien Marchand

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